Assieds-toi à côté de moi, gamin, et je te raconterai l’histoire de T’Selas Vriimon et des Esprits de l’Ombre, ceux que nous appelons Vrykanogen. Oui, l’histoire du Châtiment est connue de tous, et même un jeunot comme toi sait que les hommes, les nains, les trolls, les elfes, les orks et même les sylphelins se sont cachés sous terre pour échapper aux Horreurs qui déchiraient le monde en lambeaux. Même nous, les t’skrangs, on s’est cachés pendant tout ce temps, plongeant dans le Long Sommeil au lieu de tenir tête aux Horreurs, des ennemis si forts et si malfaisants que même les plus braves ne faisaient pas le poids. Oui, tu sais tout ça, mais que connais-tu des plus grands héros de tous les temps, ceux qui sont apparus juste après la fin du Châtiment, alors que l’on commençait à se réveiller et que les autres races sortaient à peine de leurs sombres refuges ? Que sais-tu de T’Selas Vriimon, un grand maître d’armes, encore sans égal aujourd’hui ? Il vivait sur les rives du fleuve Serpent, dans un lieu qui, avant le Châtiment, était une ville marchande renommée. Lui et ses fiers compagnons t’skrangs étaient déterminés à redorer le blason de leur ville, et souhaitaient reconstruire un Barsaive défiguré en relançant le commerce fluvial. T’Selas leur déclara qu’il allait se charger de la première étape : il irait dans toutes les villes et villages de cette région de Barsaive, et annoncerait que le Châtiment ayant pris fin, il était temps maintenant de reprendre les rênes de leurs nouvelles vies.

Alors T’Selas s’embarqua, et répandit la nouvelle que le Châtiment était désormais loin derrière nous. Il y a pas mal de kaers qui refusèrent de l’écouter, en craignant que T’Selas ne soit une Horreur déguisée ou une quelconque créature maléfique. Mais la plupart des Barsaiviens l’accueillirent à bras ouverts, et avec des larmes de joie. Souvent, des habitants lui demandait des nouvelles de parents réfugiés dans d’autres kaers, et T’Selas les rendait heureux en leur apprenant qu’il les avait croisés. Il racontait aussi à ceux dont le village était isolé comment les autres Barsaiviens s’étaient protégés du Châtiment. Et grâce à toutes ces choses qu’il faisait et qu’il savait, T’Selas Vriimon était traité en véritable ami partout où il posait les pieds.

Un jour, T’Selas voyagea jusqu’à un kaer où les habitants furent parmi les plus aimables qu’il avait croisé. Ils reconstruisaient leurs habitations à l’air libre, et les anciens du village avaient demandé à T’Selas de les aider à marchander du matériel avec le village voisin. Arrivé à ce village, le maître d’armes fût surpris et consterné : les villageois lui refusèrent l’hospitalité. Quand il leur demanda ce qu’il avait fait pour les offenser, ils ne lui répondirent pas et lui conseillèrent sèchement de déguerpir. Plutôt que de provoquer une querelle avec des gens qui se remettaient à peine d’une période de grande souffrance, T’Selas fit demi-tour et oublia rapidement la grossièreté de ces villageois.

Quelques semaines plus tard, sa route l’amena de nouveau dans la région, et il se rendit bien vite compte que ce comportement désagréable avait gagné les villages alentours. En réalité, cette grossièreté s’était transformée en colère infectieuse, et quand T’Selas se rendit au premier village pour y discuter avec ses habitants qu’il avait trouvé si charmant, ils le menacèrent violemment. Une fois de plus, T’Selas laissa poliment les villageois seuls. Mais , il n’alla pas loin et surveilla le village.

Il se rendit compte rapidement qu’aucun enfant ne jouait dans les rues, et qu’aucun vieillard n’y prenait de bain de soleil, assis en rêvant. Cette absence l’inquiéta beaucoup, et il décida de continuer à espionner. Alors que le crépuscule approchait, il vit des gens sortit de leurs maisons encore à moitié construites, transportant des petits paquets qu’ils allaient jeter dans le puits du village. Aucun regard ne fût échangé, et aucune parole prononcée. Un par un, les villageois se faufilèrent jusqu’au puits, et jetèrent leur paquet dans l’obscurité du trou. Curieux, T’Selas s’approcha discrètement pour jeter un œil sur ces paquets. L’emballage de l’un d’entre eux se défit, et T’Selas aperçut une partie de son contenu : c’était des os !

L’image des enfants et des vieillards manquant lui revint en tête, et la peur s’empara de lui. Et plus les villageois jetaient leurs petits paquets d’os dans le puits, plus une rage brûlante consumait T’Selas. Il bondit de sa cachette et chargea les villageois, en hurlant toute sa fureur. Les villageois se mirent à siffler comme des serpents et se retranchèrent dans les ombres environnantes. Le maître d’armes chassa ces habitants surnaturels dans chacune de leurs maisons, allant jusqu’à descendre dans les tunnels les plus sombres pour les traquer. Il passa au fil de l’épée tous ceux qu’il trouva. Quand plus un seul de ces villageois corrompus ne respirait, T’Selas entreprit d’enterrer convenablement les enfants tués par leurs parents, et les vieillards assassinés par leurs propres filles et fils.

Alors qu’il creusait, T’Selas Vriimon entendit le craquement sec de feuilles mortes écrasées, et le raclement de pattes griffues contre la pierre. Il leva les yeux et vit alors ceux qui jadis étaient les habitants du village, revenus d’entre les morts sous la forme des vrykanogens. Ils étaient couverts de la peau de donneurs-de-noms, mais leurs dents étaient des crocs et leurs ongles des griffes. Et les ténèbres les entouraient, les ténèbres d’un tombeau maudit et oublié de tous. T’Selas tira son épée alors que les vrykanogens attaquaient. Il combattit avec tout le talent qu’il possédait, mais l’illustre héros était exténué par le travail qu’il avait effectué juste avant. Il tua de nombreux villageois marqués par l’Horreur, tailladant avec son épée et brisant les os en utilisant sa queue comme un fouet, mais les créatures cauchemardesques finirent par le submerger.

Il mourut après avoir reçu un millier de blessures, brandissant son épée jusqu’à son dernier souffle. Puis les monstres festoyèrent sur son corps.

Informations de jeu

Cette légende décrit la déchéance d’une communauté, devenant des créatures magiques bizarres nommées vrykanogens, des monstres humanoïdes trompeurs capables d’infiltrer différentes sociétés presque comme ils le désirent. Heureusement, ils sont assez rares et plus arrogants qu’intelligents. Les vrykanogens préfèrent généralement s’attaquer à des petites colonies qui ont peu de contacts avec l’extérieur ; cette isolation leur permet d’infiltrer une colonie toute entière sans intervention. Une fois que la colonie est tombée, les vrykanogens deviennent plus audacieux et abandonnent leurs subterfuges. Des rumeurs commencent à se répandre à propos des gens étranges qui vivent dans le village, là-bas derrière la colline, ou le soudain changement de comportement d’un parent vivant dans un lieu éloigné. De tels racontars fournissent un excellent moyen d’amener les personnages vers les vrykanogens.

Une fois qu’ils entendent parler de telles rumeurs, les personnages peuvent décider d’enquêter sur ce changement brutal chez des gens autrefois agréables, ou être engagés pour ça. Les personnages devront faire attention à ne pas révéler leur véritable but, car les vrykanogens sont très suspicieux envers les étrangers, et réagiront violemment s’ils considèrent les personnages comme des intrus. Quand ces derniers comprennent ce qui est en train de se passer, ils doivent déterminer un moyen de tuer ces vrykanogens sans y passer. Développez lentement la terreur de la situation, en installant une ambiance « maison hantée » plutôt qu’un abattage organisé. En cas de confrontation, gardez en tête que la supériorité numérique donne un gros avantage aux vrykanogens, et que les personnages devront se montrer plein de ressources pour leur échapper en gardant leur santé physique et mentale.

Les vrykanogen
Les statistiques de l’hôte sont fournies dans le .pdf joint.

Commentaire

Les sages ont pour théorie que les vrykanogens sont en réalité des créatures psychiques qui n’ont pas leur propre forme physique. Bien qu’il ne semble pas y avoir de relation entre ces créatures et les Horreurs, les vrykanogen semblent provenir de l’espace astral. Les vrykanogens débarquent dans Barsaive seuls ou en petits groupes, et cherchent immédiatement des hôtes. Ces derniers sont toujours dans un état proche de la mort, incapables de résister au pouvoir des vrykanogens. Une fois que l’hôte est mort, le vrykanogen s’empare de son corps et le renforce grâce à ses pouvoirs.

Le vrykanogen se rapproche alors de ceux que son hôte aime, essayant d’utiliser son pouvoir de Corruption sur ces nouvelles cibles. Cette magie requiert un test d’incantation contre la Défense magique de la cible. Si le test réussit, la nouvelle victime devient un hôte pour un autre vrykanogen. Il fait ensuite un test de Corruption et le maître de jeu note le résultat. L’hôte peut essayer de résister au vrykanogen 24 heures après que le test de Corruption est réalisé en réussissant un test de Volonté contre le résultat du test de Corruption. Un échec indique que l’hôte est désormais complètement corrompu et est donc devenu un vrykanogen. Une réussite repousse le vrykanogen et le renvoie dans l’espace astral. Une cible qui a réussi à repousser un vrykanogen n’est pas immunisée contre une future attaque. Notez qu’un vrykanogen doit obligatoirement contrôler entièrement son hôte pour utiliser son pouvoir de Corruption et créer d’autres hôtes. Sans le contrôle total sur son hôte, le vrykanogen est limité par les capacités naturelles du corps de celui-ci.

Quand un vrykanogen est tué, il ne peut se relever. Notez qu’un vrykanogen n’est pas un mort-vivant et ne peut donc être affecté par un sort qui ne fonctionne que sur ce type de créature.

Notes du traducteur

Attention, les caractéristiques ou l’évaluation du niveau de danger de ces créatures ne représentent pas assez le danger réel de ces créatures. En effet, elles sont « invisibles » et peuvent facilement vaincre tout un groupe sans qu’il y ait le moindre combat et l’aspect « se relèvent » comme mort-vivant de la légende n’apparaît pas.

Il est possible que la légende soit déformée et que la réalité ne soit pas celle de la légende.

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T’Selas Vriimon et les Vrykanogens

Une légende de Barsaive