Chroniques de l’éclaireur - épisode 02

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Le récit qui suit est une retranscription fidèle du journal de Valérian, le célèbre éclaireur humain, tel qu’il me fut remis par son auteur en 1507 TH, à la bibliothèque de Throal.

• Mahar, archiviste et scribe elfe •

Chapitre II - Un départ mi-fugue mi-raison

Les couleurs revinrent peu à peu dans mon monde. Jamais aussi vives qu’avec Elyne, mais le temps fit son œuvre et apaisa mon chagrin. Je n’avais plus le cœur pour les aventures solitaires dans les bois. Ni l’âge sans doute. Mais, même si tout le monde croyait que je m’étais résigné à ma vie à la ferme, il n’en était rien et je rongeais mon frein, attendant de grandir encore.

Désormais, je ne loupais plus aucun passage des bardes itinérants qui s’arrêtaient dans les auberges de la ville. Je n’étais certainement pas le seul jeune homme à venir les écouter, mais aucun d’entre eux ne pouvait songer plus que moi à fuir son quotidien et devenir l’un de ces héros de légende. L’idée de partir devenait chaque jour plus forte et le travail à la ferme plus insupportable.

Mes parents ne me lâchaient désormais plus la bride, dans l’espoir que je ramène tôt ou tard une fille pour l’épouser et apporter une paire de bras supplémentaire pour l’exploitation familiale. L’une de mes sœurs s’était mariée l’année précédente et l’un de mes frères était devenu apprenti chez un forgeron de la ville. Bref, des choses normales. Mais je ne voulais pas de cette normalité. Mon destin était ailleurs. Peut-être que je finirais dans l’estomac du premier monstre dont je croiserais le chemin, mais j’étais prêt à prendre le risque. N’importe quoi plutôt qu’accepter cette existence insipide que l’on avait tracée pour moi.

J’avais presque 17 ans lorsque je me décidai. J’avais patiemment réuni ce dont j’avais besoin. Je me levai en pleine nuit et sorti sans bruit pour aller récupérer mon sac à dos qui était caché dans la remise. Il ne contenait pas autant de choses que je l’aurais souhaité, mais cela devrait suffire pour un début. La veille, la compagnie des Téméraires d’Urupa était passée à l’auberge du village et m’avait obligé à brusquer mes préparatifs. Si je pouvais les rattraper et me faire accepter dans leur compagnie, tout irait bien.

« Alors, ça y est, tu nous quittes ? »

Je sursautai brusquement et me cognai aux planches du toit bas de l’appentis. Cerina se tenait à quelques mètres de là. Elle avait décidemment le chic pour me surprendre !

« Cerina ? S’il ne plaît ne crie pas, je vais t’expliquer !
- Je ne vais pas crier et je sais très bien ce que tu es en train de faire. En fait, cela fait un petit moment que je m’attendais à ce que tu nous fausses compagnie.
- Ah ? Heu… ça se voit tant que ça ?
- Pour ceux qui te connaissent un peu et qui t’observent, oui.
- Bon, ça va alors puisqu’il n’y a que toi qui sais que j’existe dans cette maison.
- Ne dis pas ça. Tout le monde t’aime bien mais chacun à sa manière.
- C’est ça… Je n’ai pourtant pas l’impression d’être étouffé par leur sollicitude…
- Et toi ? Tu t’intéresses aux autres ? Quand est-ce que tu as aidé spontanément quelqu’un sans que l’on soit obligé de te crier dessus ?
- Heu… mais c’est pas pareil, moi je suis le dernier de la famille. Depuis quand c’est aux petits d’aider les grands ?
- Petit ? Tu t’es vu ? Tu fais 10 centimètres de plus que moi et maman ! Combien as-tu d’amis ?
- Hein ? ça n’a rien à voir, mais heu… passons. Bon, tu vas faire quoi là ?
- Rien. Je voulais juste te dire au revoir et te souhaiter bonne chance.
- C’est tout ? Tu ne vas pas essayer de me convaincre ou me menacer d’appeler les parents ?
- Non. Je devrais ?
- Ben…heu non, mais quand même…
- De toute manière, tu as pris ta décision, non ? Cela fait longtemps que je sais que tu n’es pas fait pour la vie de ferme. Va ! Vis ta vie, ne te fais pas tuer et essaies de ne pas oublier que tu as une famille qui pense quand même un peu à toi.

Là, pour le coup, j’en tombais à la renverse. Je m’approchai d’elle et déposai un rapide baiser sur sa joue avec un « merci » murmuré. Après un dernier regard que j’espérais aussi déterminé que possible, j’ajustai mon sac à dos et lui fis un petit signe de la main auquel elle répondit avec un petit sourire triste. Je me détournai puis pris le chemin qui menait à la ville.

Enfin ! J’étais libre. La piste s’offrait à moi. Fini, les corvées, les brimades et les ordres stupides ! Pourtant, c’était étrange : au lieu de la joie qui aurait dû me submerger, je ne ressentais qu’un pincement au cœur et un vague malaise. Bah ! Cela passera au détour du prochain virage.

Barsaive me voilà ! Monstres : cachez-vous et demoiselles en détresse : réjouissez-vous !


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épisode 2
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