Running With Wolf - 8 La paix de l’esprit (par Master Do)

Portrait de Sysop

Laura ! C’était cette pute de Laura qui était derrière tout ça !!!

Ça avait commencé déjà un poil sur le grill : Miss Ava avait fait en sorte qu’ils soient intégrés au sein d’une équipe de Knight Errant. Simples troufions de base au sein de « l’élite de la protection de foules », avec des spécialités correspondant vaguement à leurs profils d’origine.

Ainsi, Ryan, alias Mike, était le rigger du groupe de choc, mais aussi le légiste (pauvre Mike, lui qui savait à peine faire un bandage correct !). Glenn Voss, alias Darkness, en était l’expert en criminologie (expert en analyse des scènes de crimes, s’entend -sic !-). Earl Stollings, alias Nino, était le mage de combat. Della Herman, alias Orcinae, une nouvelle venue dans l’équipe, était la spécialiste es interrogatoire (pour une hermétique, au fond, ça se valait : à force de se faire bassiner avec des trucs chiants, on finit toujours par craquer !). Scott Andrew, alias Juan, était le spécialiste es organisation et management. En gros, le chef d’équipe (là encore, c’était pas gagné !).

Une grosse infiltration pour noyauter de l’intérieur Knight Errant et vérifier les pistes de fuites potentielles dans la chaine de commandement et d’exécution de Miss Ava.

Bien sur, Morgane finançait en partie l’équipe : après tout, elle voulait au moins autant qu’eux découvrir qui se cachait derrière le snipper qui avait eu White Cloud !

Pour jouer le jeu à fond, la fausse « investigating/striking-team » remplissait des missions basiques, du genre de celle sur laquelle ils étaient actuellement : le meurtre d’un scientifique dans un avion d’American Air Lines.

Et là, surprise : le scientifique en question n’était autre que Johnes, embarqué sous un faux nom ! Et comble de misère, non seulement il avait réussi à se faire descendre durant le vol, mais on lui avait également « emprunté » un objet assuré pour quelques milliers de nuyens. Il n’avait pas fallu longtemps à Nino pour percevoir l’aura de la chose en question : le fémur servant de clé à l’arène sous la montagne...

Après moult interrogatoires, ils avaient réussi à repérer deux suspects potentiels : Catherine Bourk qui avait réussi à glisser entre les mailles du filet de la sécurité avant même qu’ils n’arrivent, et Weasley O’Brian, un mec pas causant, avec un accent à la con mais qui venait certainement pas d’Écosse, et une tronche que Nino aurait bien carbonisé sur place, vu l’aura trop clean qui filtrait à travers ses yeux...

Bien sûr, l’interrogatoire avait fini sans la moindre info sur quoi que ce soit.

C’était en sortant de l’aéroport que ça s’était gâté, lorsque les mecs de la sécurité qui accompagnaient O’Brian pour un aller simple au QG en fourgon blindé, avaient hurlé dans leur comlink, avant de se faire exploser comme des kiwis trop murs contre les murs.

Le groupe avait à peine eu le temps de sortir qu’O’Brian, sous sa véritable forme, s’éloignait à tire d’ailes, ne laissant que poussière et débris à 300m à la ronde.

Nino avait bien lancé un esprit pour le suivre, mais que peut un pauvre esprit, si puissant soit-il, contre un dragon !

Et c’est suite à ça que, par les bons soins de Mike, ils avaient épluché les vidéos de surveillance des caméras, histoire de repérer l’autre larron (enfin, larronne, en l’occurrence), pour savoir qui pouvait bien se « balader » et faire le jeu d’une créature pareille...

Laura Scarlson ! Cette salope était encore au milieu de tout ça !

C’était elle, la conne qui avait passé la sécu en laissant juste un trou noir dans leurs souvenirs ! Et encore, ils avaient de la chance, ces cons : le trou aurait pu être fait physiquement, dans leur tête... Elle ne devait sans doute pas vouloir traîner trop.

L’équipe avait alors fait des recherches, croisant tous les indices, d’un côté matriciels via les caméras de sécurités de toute la ville, de l’autre astraux via les traces laissées par le dragon et par l’os.

Et ils les avaient localisés dans un petit motel miteux, en plein milieu de rien, avec juste une petite barrière astrale pour éviter les emmerdeurs !

OK, ils ne l’avaient pas joués super finots : Nino avait brisé la barrière pendant que Juan et Darkness se tenaient sur le palier, sur leurs gardes, et qu’Orcinae verrouillait la deuxième sortie, à l’arrière.

Ça avait bien sûr finit en baston générale, et putain, ça chauffait grave !

***

Nino relança une boule de mana vers la griffe droite, celle enserrant Laura.

Il ne fallait surtout pas que ce con de dragon réussisse à se tirer avec elle ! Elle avait l’os, et c’était certainement la seule personne en qui il devait avoir suffisamment confiance pour effectuer ce qui ressemblait à un rituel de puissance. Et de toute façon, même sans son esprit de sang que Nino s’était fait un plaisir de renvoyer en enfer quelques secondes plus tôt, cette pute avait déjà provoqué assez de dégâts !

Saleté ! Tu m’étonnes que tout le monde flippe rien qu’à leur évocation... Jamais vu une résistance magique si puissante !

Planqué derrière le fourgon de Knight Errant, il essayait de rapidement faire le point sur les (trop) rares solutions qui s’offraient à eux : Juan était HS, Orcinae avait pris une sale claque quand l’aut’ gros bill avait écroulé tout un pan de mur dessus, Darkness, malgré ses assauts aériens répétés, commençait à s’essouffler (dans tous les sens du terme !), et Mike canardait ce qu’il pouvait, mais la résistance physique des écailles semblait n’avoir d’équivalent que la résistance magique qu’elles offraient.

Un reflet métallique attira l’œil de Nino, le laissant quelques secondes dans l’expectative.

Ouais... De toute façon, ça ou aut’ chose, faut bien tenter un truc...

Quelques secondes plus tard, les deux rangers heurtèrent le sol en même temps, avec une lourdeur qui ne leur était pas habituelle...

Surtout, se souvenir de ce que m’a dit Mike !

Il aurait voulu que ça fasse un peu cowboy, ultra musclé, sortant d’un fourgon blindé aux peintures camouflage, la gateling d’un bras, le ruban de cartouche de l’autre, genre qui va péter la gueule à tout l’monde, mais quelque part, il était profondément reconnaissant à Dieu que personne ne voit le freluquet qui portait à deux mains une sorte de méga-fusil lance-grenade définitivement trop lourd pour lui, avec dans les yeux plus de peur de se faire mal que d’espoir d’en faire à l’aut’oiseau d’malheur....

Réarmer, engager,... défaire la sécurité (ouf, il y avait pensé !), vise-e-e-e-er ! FEU !

Rouvrant son deuxième œil, Nino vit la grenade passer au travers d’une flamme gigantesque qui se dirigeait droit vers lui !!!

Oh Put...

Tout se passa très vite : le fusil qui semblait comme en suspension dans l’air pendant qu’il essayait de sauter dans le fourgon alors que celui-ci, sous les commandes de Mike (qui devait ignorer que Nino en était sorti -physiquement, s’entend !-), commençait à détaller dans un énorme crissement de pneus pour échapper au souffle du dragon, la main de Nino, si proche du pare-choc et pourtant si loin, la flamme, la chaleur, le bruit d’embrasement comme une mer de pétrole qui prendrait feu tout autour, la lumière aveuglante, la douleur, la chaleur, l’horreur de réaliser ce qui se passe, ce qui se joue, dans ces quelques centièmes de secondes, millièmes peut-être, des heures impossibles, trop court, trop long, trop vite, trop...

Puis rien...

***

Nino se réveilla, l’esprit en pleine effervescence.

Il mit quelques secondes à réaliser.

Non. Rien. Rien de tout cela n’était réel. Rien ne s’était vraiment passé. Tout cela n’était qu’un rêve ! Un rêve sacrément réaliste, mais un rêve tout de même.

Il avait froid. C’était ça qui avait du le réveiller. Il se recroquevilla un peu plus sur lui même.

Faudrait qu’il pense à dire à Mike de foutre un radiateur dans son van !

Comment d’ailleurs savait-il qu’il était dans le van de Mike ? L’odeur, sans doute !

Cette pensée lui arracha un sourire.

Dégage ! T’es dans mon van et j’aime pas les squatteurs !

La diplomatie légendaire de Mike ! Sourire. La voix tremblante des « bons matins », aussi...

Nino se releva, curieusement sans trop de courbatures.

Toi, t’as encore pas décuvé d’hier !

Le sourire de Nino s’éteignit en un instant : en moins de temps qu’il n’en fallait pour dire ouf, Mike était passé de rougeot et pas réveillé à un blanc-nuage, les yeux écarquillés, et surtout, un gun tremblant à la main à pointer Nino.

Oh ! La vache, mec ! Ça va pas non ? Range ta pétoire ! Tu sais bien qu’ça m’rend nerveux, non ? T’es... T’es qui, merde ?! Non mais tu délires ou quoi ?

Le chien de l’arès prit un cran en arrière.

T’as intérêt de répondre fissa, connard ! Pasque là j’suis pas d’humeur, et la blague est vraiment pas drôle !

De la peur. De la haine, aussi, mêlée à... de la tristesse ?

Nino ne l’avait jamais vu dans un tel état !

Woh ! Arrête la picole, merde ! C’est moi, putain ! P’is range ton flingue. T’es barré ou quoi ? T’es mort !... Le mec dont... Le... Hey ! Mike ! C’est Nino ! C’est vraiment moi, merde ! C’est quoi ton délire ! P’is c’est quoi c’t’histoire de mort à la con, là ! Tu commences à m’flipper ! C’est quoi ton trip ? Je... On... On t’a enterré hier, te fous pas d’ma gueule !

Le flingue venait de faire un mouvement passablement dangereux en revenant le pointer...

Je... QUOI ???????

La voix de Nino se brisa sous l’impact des paroles de Mike.

’ttends, c’est quoi le truc, là ? Ça peut pas être toi ! T’es mort...

Mike avait des larmes qui lui montaient aux yeux ? En tout cas, son flingue commençait à faire de méchants soubresauts...

Woh ! Minute, papillon ! Si j’suis mort, comment t’expliques que j’sois là ? (et baisse ce putain de flingue !) ’pas possible !

Mike secouait la tête, comme lorsqu’il sortait d’une de ces nuits d’ivresses qui lui étaient si familières, mais visiblement, ce n’était pas une hallucination.

J’sais pas, moi ! Tiens, d’mande à Morgane ! Au moins, elle, rien qu’à voir mon aura, elle te confirmera que c’...

Mike avait déjà lancé un appel sur son comlink, et, quelques secondes plus tard, une « Morgane astrale » apparaissait dans le van.

Intéressant...

Morgane affichait un sourire intriguant.

Quoi ? C’est lui ou pas ?

Mike, lui, était toujours aussi nerveux...

Ouais, c’est lui... ’fin... Enfin quoi ? Il est différent, mais c’est lui. Différent en quoi ?

Nino et Mike avaient formulé cette question au même instant, apparemment aussi surpris l’un que l’autre.

Bon faut que j’y aille, bye ! Euh, mais c’est lui, non ? Oui. Changé, mais c’est lui. Mais y m’est arrivé quoi alors ? C’est quoi qu’à changé ? Déjà, t’es à woualpé. On en reparle une autre fois, OK ? allez, Bye ! QUOI ?!?!?!

Morgane venait de disparaitre, un sourire en coin, laissant un Nino se masquant les parties tant bien que mal, et un Mike dubitatif mais qui semblait avoir retrouvé un usage minimaliste de ses muscles du sourire.

Heu... Mec ? T’as pas des fringues ?

***

« MEURS ! »

Toute sa rage, toute sa haine, des mois à lui courir après, des semaines à subir les colibets des autres sur le fait qu’elle n’aurait même pas du survivre, s’il n’avait pas tenu absolument à la sauver.

Pour Ramon, que son esprit du sang avait bastonné, pour Orcinae que son dragon avait failli buter, pour Darkness qu’elle venait de tuer sous ses yeux !

L’elfe avait pourtant fait preuve de discrétion à se glisser derrière elle, bien planquée derrière les caisses, mais Nino l’avait vue se retourner quelques secondes trop tôt, quelques secondes qui lui avaient permis de jeter ce sort sur Darkness, le séchant sur place.

Cette raclure était la pire menace ayant jamais pesé sur sa meute !

« MEURS ! »

Non, des gens ne méritaient définitivement pas la pitié de Nino !

Et Laura Scarlson en faisait partie. En tête de liste, même !

« MEURS ! »

Dans sa fureur, il n’avait même pas réalisé qu’il s’était déplacé à la vitesse de la pensée, du fourgon blindé jusqu’à l’arrière de l’entrepôt, juste en face d’elle.

« MEURS ! »

L’énergie le submergea, comme souvent, et pourtant si différemment... Il ne su jamais réellement si c’était du à cette fureur qu’il engrangeait depuis tant de temps et qui ne demandait qu’à se libérer, ou bien si c’était du à sa nouvelle nature, mais ce qu’il ressentit alors avait une violence inouïe. Comme la vague d’une mer déchainée par la tempête, qui brise tout sur son passage, et que rien ni personne n’oserait ne serait-ce que penser pouvoir arrêter..

Il du serrer les dents sous le choc du lancement, des dents trop longues, dans ce rictus qu’il ne se connaissait pas : lèvres retroussées, nez contracté, yeux renfoncés, et, dans tout le corps, une étrange tension qui donnait l’impression qu’il allait bondir sur elle, elle et son regard de surprise, de terreur en fait, derrière cette vague de lumière bleuâtre...

Des morceaux volèrent dans tous les sens, bientôt suivi par un cri inhumain et les mouvements désordonnés d’un dragon en furie qui vient de réaliser qu’il a perdu une partie de lui-même.

Des caisses volèrent dans tout l’entrepôt. Des tritons aussi, mais çà, ils commençaient à s’y habituer depuis les quelques minutes que durait le combat... Au moins, tant qu’ils se frittaient au dragon, ces deux parties-là étaient occupées !

Vite, ramener le corps de Darkness au fourgon blindé. White Cloud n’avait pas eu droit à un enterrement décent, il ne referait pas deux fois l’impasse.

Darkness respirait !

Lèves-toi, vieux ! Magne ! Faut s’casser !

Le dragon venait de s’envoler, visiblement décider à creuser un passage dans la toiture.

Tout allait s’écrouler, et malgré la connerie visible des membres de l’équipe d’assaut de Knight Errant à l’intérieur (qui continuaient quand même à canarder une zone qui, visiblement ne contenait plus ni dragon ni triton, ni aucun ennemi identifiable), le fourgon était leur seule chance d’en sortir sans trop de casse !

Darkness cherchait quelque chose du regard.

heu... t’inquiète : elle nuira plus à personne.

Darkness connaissait cette détermination chez Nino. Le restant de colère, le contre-coup de sa puissance.

Presque par réflexe, Nino passa un revers de main sous sa narine droite, mais cette fois-ci, il n’en sortirait pas de sang.

Plus maintenant. Même si le contre-coup était présent, plus physiquement que jamais.

Et ça, il allait falloir apprendre à le gérer...